La vie n’est vraiment pas tendre avec la jeune Azabache, ex-taularde espagnole, de retour dans le monde des chanteuses de copla.
Le chant de la femme cryptée : virtual access memory
Azabache Montaya aurait sûrement voulu profiter un petit peu de sa nouvelle vie. C’était sans compter sur le meurtre de Carmina. Depuis, elle a le doigt dans l’engrenage et se retrouve à jouer les enquêteuses pour la froide Dolores Rodriguez, qui supervise l’enquête d’une main de fer, bien décidée à arrêter cette série de meurtre. Celle-ci lui apprend alors l’existence de l’immersion, une technologie qui permet de voyager en esprit dans les souvenirs d’une victime décédée, grâce à une connexion neuronale, pour peu que les deux profils soient compatibles. Azabache commence son voyage à la recherche de la vérité.
Une enquête pour démasquer ce tueur en série qui ne s’en prend qu’aux femmes, le tout dans un contexte espagnol futuriste et via le prisme de personnages au caractère bien trempé. Les idées fleurissent en éclaboussant la trame de gerbes de sang toujours plus alambiquées. Les cauchemars, les rêves, les fantasmes et les aspirations se mélangent dans un voyage d’identité qui pourrait bien secouer toute l’Espagne. Si ce n’est ni le scénario le plus complexe, ni le plus complet sur le sujet, nous sommes projetés avec force dans cet univers impitoyable, ballottés entre les traits, les couleurs et les formes. Le fond reste, mais la trame se trouble souvent au profit de la forme, même si c’est une partie intégrante de l’œuvre.
Le Chant de la femme cryptée est une bande dessinée écrite par Jimi Macias et sortie le 30 Août 2024 chez Kana, dans la collection Made In. J’avais personnellement attribué cette collection aux œuvres graphiques peu ordinaires et/ou s’apparentant au “rétro”. Nous sommes donc en possibilité de nous poser la question du bon choix de cette appartenance, même si ce n’est pas la première qu’une œuvre non-japonaise intègre celle-ci.
The Truth is Out There
Explosif. C’est le mot qui vient en premier pour cet ovni de la production. Extrêmement coloré et contrasté, les traits sont mis en avant, les cases fracturées à souhait au profit de l’impact et la forme se fond dans l’instant. L’action est infernale, pressant la déstructuration page après page, quitte à en faire pâtir notre représentation géographique, qui nous rappelle que nous sommes “ailleurs”. Les effets graphiques sont nombreux et souvent utilisés de façon très personnelle. Le charadesign se perd un petit peu dans certains personnages, mais fonctionne très bien pour les protagonistes. Le rythme semble parfois anarchique, hyperactif, mais il n’en est rien. Il est finalement plutôt posé et vous donne beaucoup d’épaisseur à l’histoire.
L’édition de Kana est tout bonnement géniale. Couverture rigide d’excellente qualité, couleurs pétantes à souhait, excellente qualité de papier qui s’accorde parfaitement avec ces dernières… La couverture est bien choisie et nous promet un ouvrage d’excellente facture, digne de son prix.
Conclusion
Le Chant de la femme cryptée est-il pour vous ? Si vous êtes habitués aux structures classiques, que ce soit en bande dessinée ou en manga, alors passez votre chemin. La forme est très intéressante, mais elle a le défaut de rendre la trame narrative bien plus compliquée à décrypter. A l’inverse, si vous êtes déjà féru d’œuvres à la structure décomplexée, alors, vous serez, sans aucun doute, passionnés par cette forme d’expression explosive.
Je lis assez peu de BD en général, mon temps étant déjà bien occupé par les manga, les romans et autres… Mais face à des pages aussi explosives, je ne pouvais pas rester de marbre ! Si le scénario a tendance à un peu trop s’évaporer au profit de la forme pour moi, j’ai pris beaucoup de plaisir à découvrir Le Chant de la femme cryptée, séduit par son visuel hors du commun.
