Ichiko est nostalgique de sa région d’origine. Elle décide donc de rentrer dans le village qui l’a vu grandir, Komori, en attendant de décider ce qu’elle fera ensuite. Mais d’ici là, elle va être bien occupée entre ses champs, la cuisine, l’entretien et les habitants du village.
Petite Forêt : méditation active d’un retour aux racines
Ichiko est une jeune femme qui a quitté son village pour vivre en ville afin d’y faire ses études. N’ayant pas particulièrement de raison de rester en ville, elle se décide finalement à rentrer dans son village natal : Komori. Une petite bourgade au milieu des montagnes de la préfecture d’Akita, au nord de l’île principale japonaise, où les jours sont doux et le temps léger. Comme coupé du monde, le village fonde encore ses activités sur l’agriculture, la cuisine et la vie en communauté. Des activités qui laissent à Ichiko tout le loisir de se recentrer sur elle-même. C’est ainsi que les souvenirs remontent. Notamment ceux de sa mère, partie du jour au lendemain alors qu’elle n’était encore qu’une petite fille. Que mangera-t-elle demain ? Aura-t-elle suffisamment de provisions pour l’hiver ? Sera-t-elle encore là le printemps prochain ?
Si la trame globale est belle et bien celle de la reconstruction de notre héroïne et du choix de son avenir, celle-ci est totalement diluée dans une tranche de vie campagnarde, axée sur le fait de jardiner, récolter, préparer, cuisiner et savourer. Une vie qui, aussi calme semble-t-elle, est finalement plutôt remplie. En effet, le village se regroupe régulièrement pour mettre en commun certaines tâches plus difficiles ou même tout simplement partager leurs ressources. De plus, l’hiver est rude, mais il apporte son lot d’ingrédients de choix. Un quotidien entre dur labeur et savoureuse récompense qui présente une vie simple, mais non moins enrichissante. C’est très instructif sous beaucoup de points, poétique dans son harmonie naturelle et finalement le théâtre de l’évolution de notre héroïne.
Petite forêt est un manga écrit par Daisuke Igarashi en 2004, pour 2 tomes dans sa version originale. Si le titre a eu une première édition chez Sakka (casterman), il est de retour dans une version intégrale depuis le 22 Mai 2024 chez Delcourt-Tonkam, dans la collection Moonlight.
Poésie photographique
Côté dessin, Daisuke Igarashi se livre énormément. Particulièrement proche de la thématique, il a pris énormément de photos et cela se ressent dans son dessin extrêmement personnel. Le trait est fin, tiré et sommaire, réduisant ce qui entoure les personnages à leurs formes essentielles. Nul besoin de compositions précises, les trames de fonds évoquent les paysages, laissant à notre esprit le soin de les accorder à ce dont nous sommes proches. Le charadesign est d’ailleurs du même acabit, constitué d’un amas de traits presque déconstruit selon les scènes et angles de vue. L’accent est mis sur l’essentiel : les émotions des différents personnages, quitte à perdre en esthétisme dans son point de vue le plus traditionnel, à l’instar d’un Larme Ultime par exemple. En revanche, la représentation des aliments est très précise et soignée, de façon à être très réaliste. Il faut bien le dire, c’est appétissant. D’ailleurs, les recettes de cuisine sont légions et se partagent comme une recette régionale, de bouche à oreille. Cette idée nous rend très vite proche de l’auteur, comme des personnages. Le rythme est celui d’une simple tranche de vie, les chapitres étant tous plus ou moins construits sur le même format. Le tout est très reposant et agréable.
L’édition de Delcourt-Tonkam est excellente. La couverture possède une texture assez singulière, légèrement transparente, mais qui colle au sujet du titre. La couverture cartonnée ressemble à un simple croquis au stylo-bille, ce qui, ici, correspond très bien à notre esthétique. Les premières pages sont en couleurs et les messages de l’auteur sont nombreux. Le grand format rend honneur au titre et se parcourt très bien. Petit plus, les 2 tomes de l’édition d’origine sont vendus 11€50 pièces, quand cette édition intégrale est vendue, à l’heure où j’écris ces mots, à 16€. C’est moins cher et donc plus accessible, en plus d’être un bon rapport qualité prix, ce qui est tout à l’honneur de l’éditeur.
Conclusion
Petite Forêt est-il pour vous ? Aussi élogieux que soient les critiques, il faut toutefois noter que ce titre est très personnel. Il présente une vision de l’esthétisme où la forme se dégrade volontairement pour laisser apparaître l’émotion dans un format très brut, comme peuvent le faire à leur façon les œuvres de Makoto Ojiro (La fille du temple aux chats et Insomniaques chez Soleil Manga). De plus, nous sommes dans une tranche de vie très calme et focalisée sur la vie à la campagne, ce qui est loin de correspondre à tous les publics. Il n’en demeure toutefois pas moins accessible à tous.
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J’ai beaucoup aimé Petite Forêt. La lecture est très agréable, instructive et intéressante. A la suite de celle-ci, on se sent étonnamment proche de Daisuke Igarashi, mais aussi de l’héroïne. C’est un titre qui ouvre les horizons pour le plus grand plaisir de l’esprit.